Entretien : David Ohana fondateur de KEIA

05/01/2021 – Par l’équipe du Comptoir des Solutions

Pour bien démarrer l’année 2021, Le Comptoir des Solutions vous propose un entretien avec David Ohana, le fondateur de Keia. L’un de nos coups de cœur de l’année 2020, c’est un avatar 3D permettant de traduire un contenu média en Langue des Signes Française. Sans prétendre remplacer les interprètes, Keia souhaite rendre plus accessibles aux personnes sourdes et malentendantes les informations de notre vie quotidienne.

 

 

Samy : Salut David, comment vas-tu en ce début d’année 2021 notamment suite au mois de novembre et décembre ?

David Ohana : Les mois sont denses… C’est aussi un peu le bilan pour moi comme pour beaucoup de gens je pense. En effet ça fait déjà 1 an que le projet Keia est sorti de terre, je peux déjà tirer de nombreux enseignements. Et je peux confirmer que l’année 2021 est pleine de promesses !

 

Samy : On se connaît pour ton projet « Keia », peux-tu nous le présenter ?

David Ohana : Oui ! Avec Keia j’espère d’abord exposer la Langue des Signes auprès du plus grand nombre. C’est ma langue maternelle, elle est magnifique mais trop discrète malgré sa reconnaissance en France comme langue à part entière depuis 2005. Keia permet de traduire automatiquement du contenu écrit ou oral en français vers la Langue des Signes Française au travers d’un avatar 3D. La plupart des langues ont leur machine de traduction automatique qui permet une accessibilité minimale au contenu. Keia permet cette accessibilité pour la Langue des Signes.

 

Samy : Comment t’es venu cette idée ?

David Ohana : Comme indiqué, la Langue des Signes est ma langue maternelle, né de parents et grands-parents maternels sourds, je la pratique au-delà de mon cercle rapproché avec la moitié de mes amis qui sont sourds. C’est quand on est fortement intégré dans la réalité de cette communauté que l’illettrisme fonctionnel devient flagrant et problématique.
En effet le quotidien d’un sourd, au-delà des lacunes connues dans la communication avec un entendant, est marqué par l’inaccessibilité au contenu écrit. Bien que ce niveau de lecture soit variable selon le parcours scolaire des uns et des autres, pour l’écrasante majorité (on parle de 80%) la lecture n’est pas aisée.
Vous avez une majorité de sourds signants en France et ailleurs qui ne comprennent pas tout à fait ce que vous écrivez. Dans un monde qui se digitalise, où l’écrit est partout, les interfaces deviennent vocales : c’est un sujet incontournable !

 

 

Samy : A quel stade de ton projet es-tu ?

David Ohana : Aujourd’hui Keia démontre que les méthodologies de machine learning appliquées dans le monde de la traduction automatique s’appliquent tout à fait à la Langue des Signes. Le résultat est probant, du moins le retour de différentes personnes ou institutions issues de la communauté sourde est extrêmement prometteur et positif.
Évidement on ne devient pas un  « google translate » du jour au lendemain, la Langue des Signes nécessite, comme pour les langues dites « rares », la création de corpus manuels et l’élaboration de bases de données « lexicales ». Aujourd’hui nous collaborons avec les grands comptes ou institutions pour étoffer cette IA (intelligence artificielle).

 

Samy : Du coup pour t’aider, tu as besoin de contenus divers et variés préalablement traduites en Langue des Signes. Mais en France, peu de contenus sont traduits de la langue française à la LSF. Comment fais-tu pour y remédier ?

David Ohana : Oui on comprend aisément que le français de Molière n’est pas tout à fait le même que celui de Kylian26 sur Twitter. Il faut apprendre ces différents « types » de langage. Les données ou corpus bilingues LSF/français n’existent pas. On les crée de toute pièce, main dans la main avec des traducteurs et experts en LSF sur la base de contenus clients variés. L’intérêt est double, aujourd’hui servir des cas d’usage clients, demain offrir une accessibilité ‘totale’ au public sourd signant.

 

Samy : Tu as participé au programme HUA de l’agence Paris & Co. Qu’est-ce que cela apporte comme accompagnement pour un jeune projet comme le tien ?

David Ohana : L’apport du programme HUA est majeur à cette étape de mon parcours. C’est d’une part l’accès facilité à un réseau d’acteurs du handicap et de l’accessibilité mais aussi une équipe qui te suit et te conseille en permanence. Une pensée toute particulière à Julie Preciat et au coaching de Pascal Waldmann et Pierre Chivot (Open Mind) qui ont véritablement participé au développement de la vision pour Keia.

 

Image avec écrit : "Keia, vos contenus automatiquement en Langue des Signes"

 

Samy : Un petit mot pour le Comptoir des Solutions ?

David Ohana : Le featuring Comptoir des Solutions X Paris & Co avec son « Rendez-Vous des Utilisateurs » (RDVU) a été clé pour Keia, il a permis de confronter d’autres aspects de notre solution auprès du public sourd mais aussi auprès de quelques acteurs, grands comptes ou institutionnels. Les retours ont été constructifs et n’ont pas manqué de marquer l’intérêt de Philippe Trotin, Directeur Inclusion et Accessibilité Numérique chez Microsoft France pour en faire un de nos premiers clients. La mise en visibilité offerte par le Comptoir des Solutions est tout simplement précieuse.
Donc pour cela, pour participer à exposer la Langue des Signes auprès du public, un grand Merci.

 

Retrouvez les replays des deux derniers Rendez Vous des Utilisateurs (RDVU) sur Youtube !

RDVU sur les Troubles Cognitifs : https://youtu.be/d91TM2BHLwU

RDVU sur les Maladies Invalidantes : https://youtu.be/pnEp3wDX5LQ


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